L'intégration des NTIC
et
ses exigences pédagogiques

Thérèse Laferrière

Université Laval



Le contexte

L'intégration des NTIC

L'établissement de partenariats






Le contexte


S'appuyant à l'origine sur les ressources naturelles, l'économie du pays s'oriente maintenant vers les industries de la connaissance dans lesquelles l'utilisation et le partage de l'information seront au coeur de l'action.

C'est dire qu'au fur et à mesure que nous entrons dans l'ère de l'information et de la communication, nous ne pouvons plus compter exclusivement sur les ressources naturelles et l'immigration pour assurer notre prospérité individuelle et collective. Notre société doit maintenant miser sur ses propres ressources humaines pour assurer sa croissance économique et demeurer compétitive. La nouvelle ère de la globalisation des marchés et du commerce international met en évidence, plus que jamais, l'importance de l'éducation.


Bâtir une société du savoir


Développer la capacité d'apprendre des personnes et des collectivités, tel est le défi qu'il nous faut relever. Nous appartenons maintenant à cet âge de la connaissance où nous aurons à apprendre notre vie durant. Selon le Conference Board of Canada, deux nouveaux emplois sur trois nécessiteront l'acquisition d'un diplôme universitaire. Dans bien des domaines, les connaissances se renouvellent très rapidement (aux cinq, dit-on, dans le domaine du génie). L'éducation "sur demande", tant à la maison qu'au travail, deviendra de plus en plus chose courante.

Les nouvelles technologies de l'information et de la communication (TIC) pénètrent le monde de l'éducation et du travail. Leur utilisation requiert l'acquisition de connaissances et de compétences nouvelles et, par le fait même, le développement d'autres routines dans l'enseignement et l'apprentissage.

Il devient donc nécessaire de former des personnes qui puissent être capables, à la fin du secondaire, de repenser, d'analyser et de synthétiser des informations tout en démontrant une bonne capacité à apprendre. Le développement de telles habiletés suppose que les élèves fassent une utilisation judicieuse des nombreuses sources d'information mises à leur disposition, mais il s'appuie également sur des activités d'apprentissage qui feront appel aux TIC. C'est précisément par le moyen de telles activités que les élèves développeront cet esprit de coopération nécessaire au développement de la connaissance. La coopération fait elle-même appel à la capacité de travailler et de résoudre des problèmes en équipe que le monde du travail requiert de plus en plus (voir le profil d'employabilité suggéré en 1991 par le Conference Board of Canada après consultation au sein des pays industrialisés et auprès d'intervenants du monde de l'éducation).

 

L'intégration des NTIC

 

La technologie offre l'immense avantage de nous libérer de la répétition de certaines tâches. Pensons au personnel des banques confronté à l'exercice de nouvelles tâches depuis l'avènement des guichets automatiques, ou aux agents de voyage qui, voyant leurs clients s'enquérir du moment où ils pourront acheter leurs billets d'avion via le réseau Internet, réalisent qu'ils devront être des guides ou des conseillers efficaces s'ils veulent conserver leur clientèle.

Pour satisfaire à la hausse des conditions standard de performance à laquelle est soumis le monde du travail, tous les ordres d'enseignement doivent revoir leurs pratiques, notamment l'utilisation du temps d'apprentissage. J'estime qu'il faut diminuer, ne serait-ce que de 2% par année, le temps consacré aux exposés magistraux pour les remplacer progressivement par des activités d'apprentissage plus exigeantes tant au plan intellectuel qu'au plan des interactions sociales. Cela ne s'applique évidemment pas aux enseignants et aux enseignantes qui ne consacrent que 40% à 50% de leur temps d'enseignement aux exposés magistraux et qui, par toutes sortes d'activités et de projets, engagent les jeunes dans des activités cohérentes, motivantes et exigeantes.

L'enseignant-e devra innover dans ses méthodes de travail :

--- en faisant appel à un réseau d'experts tels que planificateurs, théoriciens en science cognitive, artistes;

--- en jouant le rôle de guide dans la recherche de l'information : "guide dans l'infosphère", "courtiers en ressources";

--- en expliquant plutôt qu'en apportant de l'information, en aidant à poser et à résoudre un problème;

--- en co-apprenant à la manière d'un Grand Frère.

 

Les progrès dans les domaines des sciences cognitives et de la technologie rendent possible l'adoption, pour le plus grand nombre, d'un modèle d'apprentissage enrichi.

L'arrivée de l'ordinateur multimédia et des réseaux informatiques ouvre la porte à de nombreuses possibilités d'apprentissage tant à l'étudiant qu'à l'autodidacte et il est plus que jamais requis maintenant de mettre en pratique les principes de base en éducation jadis énoncés par Dewey (apprentissage dans l'action), Piaget (construction de la connaissance) et Vygotsky (apprentissage au sein du processus interactif). Il semble maintenant possible d'appliquer ces théories à une éducation de masse. L'utilisation de l'ordinateur est déjà chose courante, tout comme l'est l'accès à Internet ainsi qu'à une variété de systèmes d'apprentissage. En outre, les appareils interactifs (cd-roms, connexions au réseau Internet et aux environnements interactifs) offrent aux générations futures la possibilité d'acquérir plus rapidement et plus efficacement des connaissances de plus en plus étendues. Libéré-e de certaines tâches relatives à la transmission de l'information, l'enseignant-e peut lui-même rassembler et organiser l'information dans ces environnements d'apprentissage, voire travailler à la création de produits d'enseignement et d'apprentissage qui pourront ensuite être insérés dans le réseau Internet. Une saine tension entre la connaissance stable et non-stable s'établit alors, le savoir acquérant par le fait même un caractère dynamique.

L'exposé magistral tend en outre à former des individus obéissants et conformistes, capables de tolérer un travail à la chaîne et de répondre aux exigences d'un patron autoritaire. De son côté, l'enseignante ou l'enseignant devait consacrer un temps considérable à la préparation de ses cours, compte tenu de la dispersion des ressources documentaires. Avec les TIC, l'enseignement magistral s'avère moins nécessaire. De plus en plus les TIC viennent assister les enseignantes et les enseignants dans leur tâche, permettant à ces derniers de consacrer plus de temps aux différents besoins de leurs élèves. Une certaine latitude dans l'organisation du temps pourrait être mise au service de la création d'activités d'apprentissage et de matériel pédagogique que les enseignantes et les enseignants pourraient mettre à la disposition des personnes intéressées. Nombre de ressources et d'activités d'apprentissage sont ainsi en voie d'être constituées.

Le ou la pédagogue ne sera plus seul-e dans sa classe. L'utilisation de l'ordinateur ainsi que l'accès au réseau Internet faisant dorénavant partie des attentes sociales, les enseignantes et les enseignants seront de plus en plus incités à travailler en collaboration avec des collègues rattachés à d'autres commissions scolaires, à d'autres villes, voire à d'autres pays.

Les environnements d'apprentissage qui se créent sur le réseau Internet (Rescol, Cyberscol, Virtual U, etc.) sont riches en informations et en activités de toutes sortes. Je pense plus particulièrement ici à ce qu'offrent la National Geographic Society et la National Science Foundation ou à ce que prépare Disney ou Emg aux Etats-Unis. Je pense aussi aux protocoles portant sur l'échange de produits éducatifs entre la Nouvelle-Zélande et le Canada, le Canada et le Mexique.

Les élèves publieront aussi des travaux sur Internet. On sait déjà que les jeunes et les adultes préparent avec plus de soin les projets qu'ils comptent introduire dans le réseau Internet.

En ce qui a trait à la gestion de classe, l'approche de type projet, dans laquelle plusieurs groupes d'élèves travaillent sur des projets différents (le tiers du temps, par exemple), apparaît prometteuse. Elle pourrait en contexte québécois s'alimenter, entre autres, à Freinet, à l'apprentissage coopératif de même qu'à l'enseignement stratégique, etc.

Autrement dit, pour intégrer les TIC, faisons appel au meilleur des pratiques pédagogiques existantes. Il suffirait simplement de réveiller le pédagogue qui sommeille en nous et de réaffirmer l'engagement social qui est le sien. Si puissantes soient-elles, les TIC ne doivent pas nous dominer. Elles ne sont en effet qu'un outil de plus pour aider les collectivités à devenir ce qu'elles veulent être.

 

L'établissement de partenariats entre le monde scolaire, le collégial, les universités, les entreprises et les organismes communautaires ou gouvernementaux

Avec l'ouverture des marchés, nous assistons à une croissance phénoménale du nombre d'alliances signées entre des entreprises de niveau local, régional et international. Les institutions du secteur de l'éducation sont appelées à faire des ponts avec d'autres, et ce, au bénéfice même de l'accomplissement de leur tâche éducative.

Des problèmes concrets se posent : celui de l'acquisition d'appareils multimédias et de l'accès à Internet, celui de la formation des enseignantes et des enseignants (initiale et continue), celui du développement de contenus francophones (aux plans local, régional, national et international) et celui du soutien technique requis pour l'utilisation des NTIC. Ces problèmes ne peuvent être solutionnés de manière isolée. Mais une communauté peut décider de se prendre en charge et elle peut faire des choix dans l'utilisation de ses ressources.

Ste-Foy, printemps 1996




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Productions Tact

16 janvier 1997