SOMMAIRE

INTRODUCTION

DESCRIPTION DE L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL ET HISTORIQUE DU FORUM DE DISCUSSION DES INSPECTEURS

MANDAT ET OBJECTIFS DE L’ÉTUDE DE CAS

ASSISES THÉORIQUES ET MÉTHODOLOGIQUES

HYPOTHÈSES DE TRAVAIL, ATTRIBUTS ET PROPRIÉTÉS DES FORUMS DE DISCUSSION

ANALYSES QUANTITATIVES ET QUALITATIVES DU FORUM DE DISCUSSION DES INSPECTEURS ET DE LA BASE DE CONNAISSANCES INFORMATION EN PRÉVENTION ET INSPECTION

CONCLUSION

INTRODUCTION

 

Mise en contexte :

 

 

Ce projet conjoint, subventionné par le Bureau des technologies d’apprentissage (BTA), a été mené par l’Équipe TACT de la Faculté des sciences de l’éducation de l’Université Laval, avec l’appui du Centre francophone d’informatisation des organisations (CEFRIO) et de la Commission de la santé et de la sécurité du travail du Québec (CSST). L’environnement de travail de la fonction prévention et inspection de la CSST, plus particulièrement son forum de discussion et ses bases de connaissances associées, est apparu comme un bel exercice d’une mise en réseau d'une pratique. Comme les autres fonctions, la prévention et l’inspection se sont retrouvées, à partir de 1993, au centre d’une vaste réorganisation culturelle. En quelques années, la pratique des intervenants s’est considérablement transformée. Il est alors apparu des espaces de coopération et de collaboration entre les intervenants eux-mêmes et la clientèle organisationnelle : les entrepreneurs et les travailleurs. La CSST a élaboré, planifié et appliqué, en concertation avec ses employés, des stratégies exécutoires pour faire en sorte que cette organisation puisse mieux exploiter son capital "connaissance et expertise" en conformité avec ses nouveaux objectifs : 1) la gestion d’une loi et ses règlements privilégiant une approche-client soutenue et facilitée par une meilleure communication entre les divers intervenants institutionnels, les entrepreneurs et les travailleurs; 2) la gestion d’une organisation plus "organique" par la constitution de réseaux de coopération et de collaboration à l’interne comme à l’externe; 3) la gestion d’une organisation du travail plus dynamique et plus efficace en recourant à l’implantation d’un nouvel environnement de travail supporté par des ordinateurs reliés en réseau.

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DESCRIPTION DE L’ENVIRONNEMENT DE TRAVAIL ET HISTORIQUE DU FORUM DE DISCUSSION DES INSPECTEURS

 

 

L’environnement virtuel de travail des intervenants en prévention est constitué de quatre principaux blocs : un forum de discussion et trois bases de connaissances. L’outil principal demeure le forum de discussion dénommé "Appel à tous". Les bases de connaissances, quant à elles, sont des lieux de mémoire où sont consignées les informations jugées pertinentes à l’exercice des rôles et à la prise en charge des responsabilités dévolues aux acteurs. Nous avons écarté de l’étude de cas les "Domaines questionnés" et la "Banque de connaissances en prévention et inspection". La première n’est qu’un clone indexé et classifié du forum de discussion. La seconde est pratiquement ex situ aux processus de résolutions des problèmes soulevés dans le cadre du forum de discussion. Nous avons cependant retenu la base de connaissances "Information en prévention et inspection", car elle prolonge en quelque sorte l’interaction produite dans le forum de discussion.

 

 

L’efficacité et la simplicité sont les deux principaux attributs qui ont guidé, en 1996, les décideurs lors de l’implantation du forum de discussion. Il s’instituait comme un support aux principaux acteurs engagés dans la promotion, le soutien de la prévention de la santé et la sécurité au travail. Déjà, en 1997, l’analyse du forum présentait des statistiques significatives : 154 questions avaient été posées sur une panoplie de sujets variés et chaque question avait reçu 2,3 réponses et 10,5 jours avaient été requis pour clore une discussion. Une valeur ajoutée s'était par conséquent greffée à la fonction prévention et inspection. Toutefois, ce nouveau réseau public de communication et d’échange était circonscrit à un ensemble défini de travailleurs. En 1999, 228 personnes étaient habilitées à poser et à répondre à des questions et 718 y avaient accès en mode lecture.

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MANDAT ET OBJECTIFS DE L’ÉTUDE DE CAS

 

Cette étude de cas s’inscrit dans une problématique plus vaste, celle d’identifier les pratiques les plus prometteuses en réseau pour le bénéfice de tous. Une série d’interrogations nous a guidés : Comment la CSST travaille-t-elle en réseau ? Comment a-t-elle développé un réseau virtuel d’expertise ? Quels en sont les bénéfices ? Comment résout-elle, en réseau, des problèmes complexes et variés ? Comment conserve-t-elle les traces de son innovation stratégique ? Perçoit-on des contraintes et des limites ?

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ASSISES THÉORIQUES ET MÉTHODOLOGIQUES

 

La notion de communauté de pratique s’est développée autour des travaux de Brown, Lave, Wenger, Davenport et Prusak. L'un des constats de Brown était que l’information stratégique, celle qui était porteuse, à court terme, de construction de connaissances, se communiquait beaucoup plus d’une façon informelle, à l’extérieur des salles de formation. Pour leur part, Lave et Wenger avaient souligné toute l’importance de la participation légitime périphérique (legitimate peripheral participation); elle facilitait, dans l’exercice d’une pratique, l’acquisition de nouvelles connaissances, habiletés et attitudes. Le contexte signifiant de cet apprentissage situé (situated learning) se maillait très bien à celui favorisant une résolution de problèmes dans un contexte particulier et par rapport à un domaine donné (problem-based learning and anchored instruction). De là, l’investigation faite par Wenger. La pratique, comme l’apprentissage et le travail, étaient intimement reliés à des processus générateurs de sens et de significations négociés en coopération et en collaboration. Dans le domaine de la gestion organisationnelle, Davenport et Prusak continuaient d’explorer cette avenue. L’organisation devenait collectivement "intelligente" lorsqu’elle était capable de mettre quotidiennement en réseau tous les acteurs d’une pratique pour qu’ils co-construisent des connaissances dans le but de résoudre des problèmes. Au sein du cyberespace, la communauté de pratique se distingue donc de la communauté d’intérêt et de la communauté d’apprentissage. Dans les faits, cependant, le forum de discussion étudié s’apparente à une communauté d’intérêt à cause de son adhésion à une culture spécifique, celle de la fonction prévention et inspection. Il fait aussi référence à une communauté de pratique par les objectifs conjoints que les participants cherchent à atteindre à travers leur pratique respective et les moyens et les stratégies dont ces acteurs se dotent pour offrir à leurs pairs des réponses résolutoires.

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  HYPOTHÈSES DE TRAVAIL, ATTRIBUTS ET PROPRIÉTÉS DES FORUMS DE DISCUSSION

 

Nos hypothèses de travail sont fondées sur cinq points décrivant les bénéfices générés par une communauté de pratique utilisant un forum de discussion en temps asynchrone : 1) une flexibilité accrue en termes de partage de l’information et du temps dévolu à l’apprentissage et au travail; 2) une expérimentation de la négociation requise à une résolution de problèmes au moyen de la coopération et de la collaboration; 3) un cycle continu de co-apprentissage et de co-expertise entre pairs à travers les interactions des participants; 4) une co-construction de connaissances, de valeurs et d’une éthique de travail conduisant à l’éclosion d’une intelligence collective distribuée; 5) une conservation et un archivage de résolutions de problèmes emmagasinées au sein d’une mémoire commémorative.

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ANALYSES QUANTITATIVES ET QUALITATIVES DU FORUM DE DISCUSSION DES INSPECTEURS ET DE LA BASE DE CONNAISSANCES INFORMATION EN PRÉVENTION ET INSPECTION

 

 

De 1998 à 1999, quelque 90 personnes ont participé annuellement au forum des intervenants de la fonction prévention et inspection de la CSST; 250 questions ont été posées et 450 réponses ont été acheminées durant ces 24 mois d’activité en réseau. En moyenne, 11,37 jours ont été requis pour clore une discussion et chaque question a reçu une moyenne de 1,75 réponse. Pour sa part, la base de connaissances "Information en prévention et inspection" a enregistré une croissance soutenue d’année en année : 24 documents ont été déposés en 1996, 45 en 1997, 52 en 1998 et 79 en 1999. Durant ces quatre ans, 41 personnes ont acheminé pas moins de 200 publications sur une base volontaire. Dans les deux cas, ce sont les intervenants sur le terrain (les directeurs régionaux, les chefs d’équipe et les inspecteurs) qui ont été les principaux acteurs. Leur participation se chiffre à près de 70 % dans le forum de discussion et à 63,5 % dans celui de la base de connaissances. Les outils technologiques ont ainsi été appropriés par ceux chargés quotidiennement de promouvoir, soutenir et prévenir la santé et la sécurité du travail. Des 21 directions régionales, certaines se sont démarquées par rapport aux autres, en particulier le Saguenay-Lac-Saint-Jean, la Côte-Nord, Richelieu-Salaberry, Montréal 2, Longueuil et Yamaska. Le centre administratif de Montréal et le siège social de Québec ont également produit un nombre important de questions, de réponses et de documents déposés. Dans le forum de discussion, de tout le personnel administratif et professionnel du centre administratif, ce sont les bibliothécaires qui sont le plus engagées.

 

 

En comparant 1998 à 1999, par rapport aux questions posées et aux réponses transmises, on peut croire statistiquement à une diminution de l’activité de communication et d’échange entre pairs. Le degré de participation relativement stable et identique durant ces deux années infirme toutefois ce constat. En fait, les interactions ont simplement atteint un degré de maturité. Seuls les cas problèmes, les questions litigieuses, les problèmes sortant de l’ordinaire, suscitent un "Appel à tous". Une richesse de savoir explicite et tacite est déjà emmagasinée au sein des "Domaines questionnés", un clone du forum de discussion, ou à l’intérieur de la base de connaissances "Information en prévention et inspection". Plusieurs problématiques compliquées et variées ont ainsi été compilées, classées, indexées, analysées et déposées au sein d’une mémoire active et pérenne.

 

 

À partir d’énoncés décrivant des bénéfices potentiels (voir la section 4), nous nous sommes attardés à quelques attributs communs de la résolution de problèmes : le partage de l’information, l’acquisition de nouvelles expertises et de nouvelles compétences, la transversalité des expériences, la distribution élargie des savoirs et des savoir-faire, la recherche de l’excellence. Tous les exemples démontrent qu’il y a eu un partage efficient de l’information selon la nature des demandes (requêtes administratives, recherches de solutions techniques adaptées à la réinsertion d’un travailleur, requêtes d’employeurs intéressés à améliorer la santé et la sécurité de leurs employés, requêtes de prévention à des accidents du travail, enquêtes sur des cas d’exposition au danger ou résultant d’accidents ayant occasionné des blessures graves ou une mortalité). Dans plusieurs cas, à la résolution de type on the job situation s’est ajouté un attribut de type just in time qui projette des formes de co-apprentissage, de co-expertise et de co-construction des connaissances. En exposant une problématique particulière, les demandeurs sollicitent à travers leur questionnement le savoir tacite de leurs pairs. La transmission de ce savoir contribue directement au développement de nouvelles compétences. Ces acquis renferment également des dividendes associés à la recherche de l'excellence, à la transversalité des expériences et à la distribution élargie des savoirs et des savoir-faire. Plusieurs exemples étayent le bien-fondé de cette affirmation.

 

 

Au fil des ans, une mémoire se constitue. Outre les "domaines questionnés", la base de connaissances "Information en prévention et inspection" remplit également cette fonction d’archivage et de conservation. À cause de son caractère de volontariat, cette dernière se démarque de la précédente; c’est un signe d’engagement, d’identité et d’appartenance à une communauté de pratique. De 1996 à 1999, le contenu de cette base de connaissances s’accroît tout en se diversifiant. Il correspond de plus en plus aux activités couvertes par la fonction prévention et inspection; il devient, à la fin, un véritable "routier" de l’information jugée pertinente pour d’autres pairs par des acteurs eux-mêmes engagés dans des routines de travail analogues ou similaires.

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CONCLUSION

 

L’environnement virtuel de travail de la fonction prévention et inspection a procuré des dividendes tangibles pour la CSST et tous les participants impliqués dans ce mandat et cette mission. Le partage de l’information, le co-apprentissage, la co-expertise, la co-construction de connaissances, la transversalité des expériences, la distribution élargie des savoirs et des savoir-faire, la constitution de lieux de mémoire associés à l’identité et à la pérennité ont servi l’organisation et les intervenants à s’approprier, en réseau, des résolutions de problèmes complexes et variés. En prime, cet espace a été occupé par ceux qui se tiennent en première ligne. De l’exercice, il ressort néanmoins que les rapports demeurent individualisés même s’ils présentent de fortes connotations collectives en termes de finalité et d’accomplissement; les outils technologiques sont perçus, jusqu’à un certain degré, comme accessoires. D’une certaine façon, la plupart des acteurs ne perçoivent que d’une manière diffuse leur appartenance communautaire bien qu’ils réussissent, bel et bien, à s’approprier les usufruits. Malgré ce bémol à la clé, cette étude de cas démontre la possibilité de travailler en réseau pour le bénéfice de l’organisation et de tous ses membres.

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